Sommaire
Définitions
La définition la plus communément acceptée en France est que « l'ISR est une forme de placement consistant à prendre systématiquement en compte des critères liés à l'Environnement, au Social et à la Gouvernance (on parle aussi de critères ESG), en sus des critères financiers »2.L’Association Française de la Gestion financière et le Forum pour l'Investissement Responsable donnent également une définition de l'ISR dans le cadre du Code de transparence3 : « Application des principes du développement durable à l’investissement. Approche consistant à prendre systématiquement en compte les trois dimensions que sont l’environnement, le social/sociétal et la gouvernance (ESG) en sus des critères financiers usuels. Les modalités de mise en œuvre peuvent revêtir des formes multiples fondées sur la sélection positive, l’exclusion ou les deux à la fois, le tout intégrant, le cas échéant, le dialogue avec les émetteurs ».
Une définition européenne a été donnée dans un avis du Comité Économique et Social Européen (Cf. CESE, Avis du Comité économique et social européen sur le thème « Produits financiers socialement responsables » (2011/C 21/06) avis d'initiative, point 3.1.1). « Il s'agit de produits d'épargne (comptes courants, comptes à fort rendement, livrets d'épargne, dépôts structurés), de produits d'investissement (institutions d'investissement collectif: fonds et sociétés d'investissements; pensions et assurances: plans et fonds de pension, plans de retraite, assurances- vie ou unit linked; fonds thématiques), d'instruments de financement du crédit et de mécanismes de soutien financier (microcrédits, fonds de roulement, fonds de garantie mutuelle et capital-risque), qui comprennent dans leur conception des critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance, sans négliger aucunement les objectifs nécessaires en matière de risques et de rentabilité financière ».
Les différentes approches de l’ISR
Il est possible de distinguer plusieurs grandes approches de l'ISR4:- La sélection ESG : Cette approche consiste à sélectionner les entreprises ayant les meilleures pratiques environnementales, sociales ou de gouvernance. La méthode de gestion la plus répandue en France est l'approche Best in Class qui consiste à privilégier les émetteurs les mieux notés d'un point de vue extra-financier au sein d'un secteur d'activité5.
- L'exclusion : L'approche dite "exclusive" est la méthode originelle des fonds ISR. Le gérant peut faire le choix d'exclure les entreprises qui ne respectent pas les normes ou conventions internationales, c'est ce qu'on appelle les exclusions normatives. D'un autre côté, le gérant peut également décider d'exclure de ses choix d'investissement des secteurs d'activité entiers tels que le tabac, les armes ou encore la pornographie et ainsi pratiquer une approche d’exclusion sectorielle. Cette méthode d'exclusion reste largement pratiquée dans les pays anglo-saxons.
- L'approche thématique : Les fonds n'incluent que des
entreprises agissant dans un secteur donné ou favorisant certaines
pratiques. Les investissements seront ainsi concentrés dans des
entreprises actives dans les domaines du développement durable tels que
les énergies renouvelables, l'eau, le traitement des déchets, la
santé,etc...
Cependant, que la thématique soit environnementale ou sociale, les entreprises doivent passer au travers d'un filtre ESG.
- l’engagement actionnarial : il consiste, pour les investisseurs, à exiger des entreprises une politique de responsabilité sociale plus forte par un dialogue direct, mais aussi par l’exercice des droits de vote en assemblées générales. On parle également dans ce cas d’activisme actionnarial.
Historique
Dénommé également SRI pour Socially responsible investing, la tradition anglo-saxonne de l’ISR trouve ses racines dès le XVIIIe siècle notamment avec le mouvement religieux philanthropique quaker, activement engagé contre l'esclavage, l'activité corsaire ou tout acte de violence, ou encore à la fin du XIXe siècle aux États-Unis où des communautés religieuses interdisaient à leurs membres d’investir dans des sociétés d’armes, d’alcool ou de tabac.Le premier ISR de l’économie moderne remonte à 1971. À cette date, deux pasteurs de l’Église méthodiste, Luther Tyson et Jack Corbett, lancent le Pax World Fund pour investir dans les entreprises non liées à l’armement.
En Europe et en particulier en France en 1983, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD) lance avec le Crédit Coopératif, le premier fonds commun de placement de partage Faim et développement. Une partie des revenus de cet OPCVM est affectée à la création d'entreprises dans le tiers-monde. Dans le même temps, la Société Meeschaert Asset Management créait le premier fonds commun de placement éthique Nouvelle stratégie 50, à l'instigation de Sœur Nicole Reille décédée le 7 mai 2012 qui a présidé l'association Ethique et Investissement de 1983 à 2002 en prônant l'approche d'exclusion pour certaines activités (l’armement, le jeu, le tabac, l’alcool et la pornographie tout en sélectionnant les entreprises en faveur du social et favorisant des pays en développement. Son objet était de proposer aux investisseurs, particuliers ou institutionnels, des placements boursiers « respectueux de la place de l'homme ». D’abord destiné à valoriser les retraites des religieux des congrégations, est représentée au sein du comité d’éthique Hymnos. Les valeurs du portefeuille qu’elle a créé qui recoupent en partie celles d’Hymnos, incluent France Télécom, le Crédit lyonnais, Rhodia, Axa, Casino Guichard, Unilog, etc. Le choix de ces titres se serait fait « à partir des critères classiques de rendement. Il s’appuie également sur la consultation d’indicateurs éthiques d’évaluation des entreprises établis par un organisme indépendant. Les indicateurs retenus sont conformes aux valeurs défendues par l’association Éthique et Investissement », présidée par Sœur Nicole Reille. « Ces valeurs, précise-t-elle, permettent d’investir des fonds en accord avec celles d’une congrégation, à savoir les droits de l’homme, le respect et le développement de la personne qui entraîne la stratégie sociale de l’entreprise et les modes d’implantation dans les pays du tiers-monde. »
Depuis le 27 avril 2006, les Principes pour l’Investissement Responsable (UNPRI) sont désormais consacrés par les Nations unies dans le prolongement du pacte mondial. Ces principes marquent la reconnaissance de l’ISR à l’échelle mondiale.
Origine
L’ISR est fondé sur la conviction que la prise en compte de facteurs sociaux et environnementaux, d’éthique et de gouvernance assure la performance financière des sommes investies à moyen et long terme compte tenu d’une meilleure appréhension des risques et d’un meilleur management.Pour les investisseurs confessionnels, l’approche ISR correspond à une démarche qui a des fondements religieux profondément liés à leur "éthique des affaires" dont les perspectives sont spécifiques.
On pourra considérer rétrospectivement que la récente consécration de Muhammad Yunus, père du microcrédit constitue une approche ISR avant l’heure parfaitement adaptée à la réalité des sphères d’économiques marchandes écartées des circuits de financements traditionnels dans les économies sous-développées, comme celles dites développées.
L’ISR ne peut constituer en tous les cas a contrario un label d’investissement super-performant ce qui est peut être « préjudiciable à sa généralisation », selon Danyelle Guyatt (cf. Thèse à l’université de Bath, UK)6.
Enfin, pour les promoteurs du développement durable in concreto, l’ISR marque d’évidence le signe que le levier financier est désormais capable d’apporter tout son poids à l’évolution des modèles macro et micro-économiques qu’il nourrit. Une nouvelle sensibilité dans le conseil, une orientation stratégique majeure affichée par les institutions financières publiques comme privées qui peuvent permettre d’activer plus rapidement de nouveaux comportements sur toute la chaîne de valeur du producteur au consommateur qui devront internaliser le principe pollueur-payeur.
Le développement de l'ISR sera en tous les cas intrinsèquement lié à la manière dont les investisseurs dans leur ensemble sur un marché financier globalisé appréhendent la donne sociale et environnementale. Les rapports annuels du CERES7 indiquent clairement depuis 2005 un changement d'attitude de plus en plus net notamment dans le secteur bancaire, véritable "colonne vertébrale" de l'économie mondiale qui prend de plus en plus au sérieux l'impact du changement climatique dans sa gestion des risques. Des progrès sont sans doute encore à faire de la part des banques en matière de transparence non seulement de leurs produits mais aussi sur leurs activités au regard de l'ISR et de leur engagement au titre de la RSE (responsabilité sociale des entreprises) compte tenu des dernières enquêtes de certaines associations de consommateurs dans plusieurs États membres8.
L'expérience montre que l'investissement socialement responsable résiste bien dans un contexte de crise financière et économique, et qu'il procure une bonne sécurité des placements.
Moyen et méthodes
- Construire une grille
Hétérogènes dans un marché en croissance, ces grilles varient par secteur et selon la culture et l’expérience de chaque investisseur, institutionnel ou non, grand ou petit. Diverses agences de notation ou rating social spécialisées proposent leur grille et classement pour aider les investisseurs à faire leur choix sur le marché. Ces grilles tendent toutes à traquer les risques spécifiques, parfois sociétaux et les pratiques bonnes ou mauvaises des entreprises visées.
Olivier Marquet de la banque belge Triodos Bank, petite structure financière de près de 400 collaborateurs, liée à l'anthroposophie, confirme la pro-activité des investisseurs éthiques: « l'investissement durable ne consiste pas uniquement à constituer un portefeuille de placement mais aussi à engager un dialogue avec l'entreprise, à exercer une pression sur elle afin qu'elle mette en œuvre une politique durable »9.
La recherche dans le domaine n’en est qu’à ses débuts. Les principaux investisseurs ISR ont décidé de développer la réflexion analytique sur une logique d’investissement qui bouleverse les habitudes en soutenant financièrement une association consacrée à l'EAI ou l’Enhanced Analytic Initiative.
Comme tout débat sur la mesure et le type de thermomètre utilisé, la conviction des observateurs peut se résumer à la formule suivante : « Pas d'ISR performant sans reporting pertinent ». Les termes du débats sont désormais clairement posés et continueront de perdurer tant que la pertinence des indicateurs durables n'aura pas été confortée par des performances également durables malgré un contexte de mutation rapide des modèles économiques et financiers pour bon nombre d'activités et de secteurs.
- Documenter la grille
Dans les années à venir, les investisseurs ISR seront sans doute de plus en plus exigeants avec le détail et la fiabilité des données et des indicateurs de suivi. Les tableaux de marche de la réalisation des objectifs proposés par les entreprises seront au centre de cette vigilance.
Les enquêtes voire des tests sur le terrain complémentaires à la revue documentaire devraient également compléter cette vérification des engagements pris.
- Le cas particulier du financement de projet
Les ONG interpellent de plus en plus les banques qui financent des projets qu'elles contestent, des barrages hydrauliques aux centrales nucléaires (Centrale nucléaire bulgare Belène qui oppose la BNP et les Amis de la Terre10) .
L’ISR en France
En 2010, les encours ISR ont atteint 68,5 milliards d'euros, soit une hausse annuelle de 35 %. Selon Novethic, plus de 300 fonds11 sont proposés aux épargnants français en 2011.Un modèle français de l'ISR en évolution permanente
2001-2011 : dix ans de promotion
- 2001 : Le Forum pour l'Investissement Responsable (FIR) voit le jour. Le FIR est l'association professionnelle des acteurs de l'ISR en France dont l’objectif social unique est la promotion de l’ISR en France et au niveau Européen. Cette association a la particularité de regrouper l'ensemble des acteurs de la chaîne de valeur de l'ISR : investisseurs, sociétés de gestion, conseils - courtiers, agences de notations extra-financières et conseil investisseurs, organisations syndicales, organisations de place mais aussi des personnalités qualifiées.
- 2005 : Le FIR a lancé le Prix FIR de la Recherche Européenne « Finance et Développement Durable ». Ces prix récompensent des travaux universitaires et financent des bourses de recherche.En matière de gestion de fonds ISR, l'approche française semble privilégier celle de l'approche best in class en sélectionnant par secteur les sociétés les mieux notées du point de vue de leur cotation extra-financière selon les critères ESG (Environnement, Sociétal et Gouvernance) et sans procéder à des techniques d'exclusion à l'anglo-saxonne. En 2011, Le FIR s'est allié aux PRI (Principles for Responsible investment) qui, eux-mêmes, remettent un prix mondial depuis 2010.
- 2008 : En mai, Paris Europlace publie 11 recommandations pour favoriser l'ISR12 : une initiative indispensable pour crédibiliser l'engagement des acteurs français dans cet enjeu d'investissement qui n'est désormais plus du tout un simple phénomène de mode. Pour promouvoir la réflexion française sur l'ISR, une chaire consacrée à l’ISR et intitulée "Finance durable et investissement responsable" a été mise en place la même année avec le soutien de l'AFG13.
- 2009 : cette année semble marquer un tournant avec la montée en puissance de l'ISR des épargnants individuels sans oublier l'épargne salariale et la conversion de fonds classiques en fonds ISR. Pour promouvoir l'ISR, l'association ORSE publie un guide fin 2009 qui permet un tour d'horizon complet et anticipe l'article 53 de la loi dite Grenelle I qui dispose : « L’investissement socialement responsable sera encouragé par des mécanismes incitatifs et des campagnes d’information ».
- 2010 :
- Conformément aux vœux du législateur, l'ISR a même droit à sa Semaine. En effet, sous l'impulsion du Ministère du Développement Durable, la première semaine de l'ISR, organisée par le FIR se déroule du 4 au 10 octobre 2010. Cette semaine a pour vocation de promouvoir l’investissement socialement responsable (ISR) auprès du grand public, des institutionnels et des professionnels (gestionnaires d’actifs, consultants, réseaux de distribution…)14.
- Le Forum pour l'Investissement Responsable a mis en place une plateforme de dialogue entre investisseurs et entreprises appelée CorDial15 pour "Corporate Dialogue". L'objectif de cet outil est de permettre aux investisseurs d'effectuer des recommandations sur des questions de RSE. En 2010, le groupe de travail "CorDial" à traité deux thèmes relevant du domaine de la "gouvernance" et du "social". En 2011, CorDial travaille sur le sujet des risques et opportunités des enjeux environnementaux.
- 2011 :
- Le Forum pour l'Investissement Responsable organise la seconde édition de la Semaine de l’ISR du 10 au 16 octobre. Cet événement est toujours placé sous le Haut patronage du Ministère de l’Écologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement (MEDDTL)16. Au total, 54 événements ont été organisé partout en France et sur internet.
- Pour la première fois, le FIR s'est associé à l’agence de notation française Vigeo afin de remettre un prix commun récompensant les entreprises qui développent les meilleures pratiques en matière de gouvernance responsable. Ce prix s’est inscrit dans le cadre de la Semaine de l’ISR 2011. Pour cette édition, le jury a décidé de prendre en compte la performance des entreprises sur des critères relatifs aux principes, objectifs et risques Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) dans la gouvernance d’entreprise. Le Prix FIR-Vigeo a été décerné sur base des indices suivants : STOXX Europe 50, CAC 40 et SBF 120. La logique veut que chaque année le prix soit remis sur la base d’un critère E(environnement), S (Social) ou G (Gouvernance), indissociable de la notion d’ISR en France.
- Les lauréats de l'édition 2011 sont Unilever pour le STOXX Europe 50, Vivendi pour le CAC 40 et Rhodia pour le SBF 12017.
Les Investisseurs institutionnels, acteurs majeurs
Les "zinzins" ou investisseurs institutionnels restent déterminants en créant des fonds ISR en actions et/ou en obligations. Selon la Tribune (cf."Les entreprises et les critères extra-financiers" 16/06/2008) « Des études récemment réalisées par des maisons de notation montrent que 45 % des investisseurs institutionnels français croient en une création de valeur ajoutée, née de la prise de responsabilité de la part des entreprises. Ce constat repose sur la conviction qu'une prise en compte des critères extra-financiers permet d'avoir une vision globale des risques supportés par les entreprises et peut donc avoir une influence significative sur leur performance à moyen et long termes. Ils sont convaincus que, dans le futur, les critères extra-financiers seront considérés davantage dans les décisions de placements par les gestionnaires de fonds. Pour identifier les entreprises les plus durables et les plus responsables, ces fonds d'investissements vont se baser sur la recherche faite par des maisons de notation spécialisées dans ce domaine et sur des indices comme le FTSE4Good et le Dow Jones Sustainability Index. Ces deux indices représentent donc de réels benchmarks pour les investisseurs socialement responsables ».« Selon une étude publiée par Novethic, l’ensemble du marché de l’ISR (OPCVM et fonds dédiés) a progressé de 88 % pour s’établir à 16,6 milliards d’euros en 2006 mais seuls 6,06 milliards provenaient des particuliers. Et encore, sur ce montant, seulement 3,25 milliards d’euros proviennent de produits ISR vendus aux particuliers par les réseaux bancaires, le solde étant engagé dans l’épargne salariale »18.
En 2010, la tendance de fond se confirme : « Certes, le poids des particuliers s'est envolé de 111 % pour atteindre 15,6 milliards d'euros d'encours, contre 7,4 milliards d'euros en 2008. Mais les investisseurs institutionnels (en tête desquels les fonds de pension publics et fonds de réserve, caisses de retraite et de prévoyance, compagnies d'assurance et mutuelles) restent très largement majoritaires, avec 69 % des encours ISR »19.
Banques et assurances françaises désormais impliquées
Mais le système bancaire français semble prendre l'ISR au sérieux. L'approche bilan carbone initiée par la Caisse des dépôts pour sa propre politique d'investissement20 pourrait inspirer les modèles d'investissements selon le principe d'efficacité et le principe de neutralité carbone comme d'autres banques l'affichent déjà dans le monde. La Caisse d’épargne a proposé en 2007 l'étiquetage ISR de tous ses produits bancaires selon trois critères : risque financier, intensité carbone et prise en compte des impacts sociaux et environnementaux. Malheureusement, cette banque est revenue en arrière après une année et a abandonné cette démarche éthique et transparente.Pour le secteur de l'assurance, cette approche commence également à trouver un certain succès avec la CNP et BNP Paris Assurance.
Le grand public : un défi pour l'ISR en France
Alors que depuis dix ans les investisseurs institutionnels ont été sensibilisés à l'ISR, ce concept reste encore méconnu du grand public.D’après un sondage EIRIS-Ipsos d'octobre 201121, seulement 8 % de français savent en donner une définition précise de l'ISR alors qu’une grande majorité d’entre eux (60 %) disent accorder une place importante aux critères sociaux et environnementaux dans leur décision de placement et cette place est amenée à grandir. Il existe donc bien une demande. D’un autre côté, quasiment tous les réseaux bancaires français proposent des produits financiers ISR. L’offre existe bien, mais elle reste peu proposée.
Afin de faire connaître l'ISR aux français, plusieurs initiatives obligeant la structuration du marché se sont mises en places.
La première est le Code de Transparence22 élaboré par l'Association Française de la gestion financière (AFG) et le FIR. Ce code est la version française du Code européen de Transparence pour les fonds ISR ouverts au public. Il est obligatoire pour tous ces fonds. Ce Code est accompagné d’un Manuel fournissant aux sociétés de gestion, dont les fonds sont signataires du code, des indications supplémentaires à même de les aider à apporter les réponses appropriées aux questions posées.
De façon complémentaire au Code de Transparence, Novethic - filiale de la Caisse des dépôts - remet des labels23 attribués aux fonds ISR dont la gestion prend systématiquement en compte des critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance. Leurs promoteurs doivent expliquer publiquement la nature des pratiques ISR retenues, publier un rapport régulier portant sur les caractéristiques ISR des fonds ainsi que sa composition intégrale et détaillée. En 2011, 156 fonds ont été labellisés par Novethic.
Grâce à ces deux initiatives, la France représente un des marchés les plus structuré d'Europe.
Des produits d'épargne populaires ?
Le modèle ISR en France a progressé dès 2006, mais il semble en 2010 avoir toujours du mal à se populariser sans doute compte tenu de l’absence d’une culture d’épargne actionnariale directe à l’anglo-saxonne et ce malgré l’accroissement progressif de l’épargne salariale.Peut-être un début d'explication sur ce défaut de popularité : « Ce soudain engouement pour les fonds verts pose cependant un problème : il est difficile d'y voir clair, pour l'épargnant particulier, dans une offre assez peu structurée. Il y a confusion entre produits verts et fonds d'investissement socialement responsable (ISR). Ce sont deux catégories différentes, mais certains produits verts peuvent être ISR », résume Anne-Catherine Husson-Traoré, directrice générale de Novethic, le média en ligne du développement durable24.
Depuis la crise financière de 2008-2009 qui a ébranlé la confiance générale des clients en leur banque et dans les produits d'épargne en actions, un doute du grand public persiste sur la finalité effective de ce type d'investissement.
Comme l'indiquent certains observateurs, « les Amis de la Terre ont étudié la composition des fonds ISR labellisés par Novethic en 2009. Parmi les 89 fonds analysés, pas moins de 71 contiennent dans leurs portefeuilles d'actifs au moins une des 15 entreprises controversées sélectionnées par les Amis de la Terre pour leurs pratiques sociales et environnementales critiquables : Total, BP, Areva, France Télécom, BNP Paribas, AXA, etc. Pour Soisic Rivoalan, rédactrice du rapport, l'appellation « ISR » est totalement illégitime pour une immense majorité des produits d'épargne ainsi nommés par les banques et les assurances elles-mêmes »25.
Un véritable soutien de l'éco-industrie ?
Outre le succès de cette formule d’épargne via les intermédiaires financiers, son débouché naturel en faveur de l’écoindustrie nationale semble laisser à désirer en France en comparaison avec d’autres circuits financiers. Selon le rapport Chambolle de 200626, « Une autre voie qui mériterait d’être explorée est celle de l’investissement socialement responsable. Dans les autres pays comparables, une part de cet investissement se consacre au développement des éco entreprises (fonds cleantech), ce qui n’est pas le cas en France. (…). Un dialogue devrait s’ouvrir avec les responsables de ces fonds sur ce point. » (cf. p. 29).L’ISR à travers le monde
Les montants investis au titre de l’ISR connaissent des progressions diverses suivant les places financières et parfois remarquables ; mais l’investissement ISR conserve une part négligeable au regard de l’investissement total mondial.Comme l’indique Stuart Langdridge, spécialiste britannique de l’ISR (European Voice, 29/11/2006, p. 37), « Les petites et moyennes valeurs sont seulement juste "sur le radar" ce qui laisse présager de réelles progressions pour ces entreprises dont potentiel ISR n’est pas à écarter ».
La crise financière qui frappe les États-unis comme les autres places financières depuis septembre 2008 peut constituer un test de résistance des produits ISR existants.
Europe
Comme l'indique Y. Roudaut (cf. Le Monde, Comment investir utile, 11-12/05/2008), chaque pays privilégie une approche différente. « Entre la vision britannique qui promeut l'activisme actionnarial, l'approche scandinave, accordant une place importante à l'exclusion, l'allemande, privilégiant les fonds verts, et l'attitude plus modérée des Français en matière d'engagement actionnarial, l'ISR, offre de multiples visages ».Le suivi des valeurs ISR en Europe repose principalement sur deux indices utilisés par les fonds pour mesurer la performance ISR : DJSI Europe Composite et FTSE4Good Europe. Des associations spécialisées comme SAM (Suisse) ou Ethibel (Belgique) enrichissent par leurs propres indices utilement la lecture ISR.
European Sustainable Investment Forum (Eurosif) a lancé un code de transparence pour rendre l'ISR plus accessible aux non-initiés. Selon les derniers chiffres 200927, l'ISR atteint 1 200 milliards, soit 10 % des encours européens globaux.
Brefs échos des marchés nationaux européens de l'ISR (chiffres 2009 Eurosif, montant des encours des fonds):
- Suède : 1er marché européen de gestion ISR (216,6 milliards € d'encours). Les fonds de pensions ont été obligés par le législateur d'intégrer des placements ISR dans leurs portefeuilles.
- Pays-Bas : 2e marché européen de gestion ISR (130,1 milliards € d'encours).
- Royaume-Uni : 3e marché européen de gestion ISR (54,7 milliards € d'encours).
- France : 4e marché européen de gestion ISR (50,7 milliards € d'encours). Fin 2010, le total des encours ISR s'élevait à 68,3 milliards d'euros28 (Source Novethic).
- Belgique : 5e marché européen de gestion ISR (24,4 milliards € d'encours).
- Espagne : 6e marché européen de gestion ISR (14,7 milliard € d'encours).
- Italie : 7e marché européen de gestion ISR (13,1 milliards € d'encours).
- Allemagne : 8e marché européen de gestion ISR (12,2 milliards € d'encours).
- Autriche : 9e marché européen de gestion ISR (2,1 milliard € d'encours).
Afrique/ Moyen-Orient
- Afrique du Sud : FTSE et la Bourse sud-africaine (JSE) ont lancé le projet "Philosophie et Critères" en vue d’établir un index d’investissement socialement responsable.
- Maroc : La Wafabank crée un premier fonds de partage en 2000.
Amériques
- États-Unis : constituent par sa tradition financière le premier marché ISR (176 Md. $ en 2002 selon SIF). Les acteurs économiques ne font pas de différence entre l’investissement solidaire et l’investissement socialement responsable qui est synonyme.
- Canada : second marché en importance (50 Md. $ placés dans des fonds "éthiques", données 2002).
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